Quels sont les premiers chantiers de Patrice Caradec, nouveau président du SETO ?

C’est devant une salle pleine à craquer à la bonne humeur contagieuse que René-Marc Chikli a ouvert la quinzième édition du Forum du SETO, à Deauville, le 19 juin.

« Je suis touché que vous soyez tous là » a-t-il commencé en s’adressant à ses confrères. Après trente ans à la présidence de ce qui fut d’abord un cercle d’études avant de devenir en 2013 le Syndicat des entreprises du Tour Opérating, il passe la main à Patrice Caradec (ex Vacances Transat et Alpitour France), élu à l’unanimité lors de l’assemblée générale.

Par-delà l’émotion légitime, la passation de pouvoir intervient dans un contexte rendu fragile par les crises successives, en particulier l’impact des diverses déclarations du président des Etats-Unis, Donald Trump, et le choc de la confrontation entre Israël et l’Iran.

Lire aussi : SETO : Patrice Caradec succède à René-Marc Chikli

« L’hiver a été globalement bon pour les tour-opérateurs. Mais depuis mars/avril, la baisse des réservations est évidente, variant selon les destinations et les positionnements de chacun, et l’été est incertain » a convenu René-Marc Ckikli, en attendant que le SETO n’en dévoile davantage lors de la conférence de presse qui se déroule ce matin.

Pas question toutefois de sombrer dans un pessimisme excessif et René-Marc Chikli a rappelé, avec ironie, que si de nombreuses compagnies aériennes relançaient une activité de tour-opérating (à l’instar d’Air France Holidays), c’est que « le métier intéresse toujours ».

Plusieurs dossiers chauds vont occuper le SETO et son nouveau président dans les prochains mois. La sécurité des voyageurs, alors que les crises géopolitiques et climatiques se multiplient, constitue un élément essentiel.

A ce titre, Hervé Tilmont, DG du SETO, s’est félicité de « l’excellente relation entre la commission sécurité du syndicat et le ministère des affaires étrangères, qui permet de prendre les bonnes décisions ». Comme par exemple la réouverture aux touristes de plusieurs oasis d’Egypte.

Autre sujet d’inquiétude, la complexité croissante des formalités pour visiter certains pays (comme l’assurance obligatoire pour se rendre à Zanzibar), qui oblige en permanence les tour-opérateurs à jongler.

Lire aussi : Zanzibar : la nouvelle assurance (taxe) de discorde...

Dans la même veine, les allers-retours incessants des pouvoirs publics pour l’augmentation de la taxe de solidarité sur les billets d’avion (TSBA) demeurent un point de clivage avec les compagnies aériennes.

« Elles ont été très promptes à prélever cette taxe de façon anticipée. C’est autre chose pour les remboursements » a dénoncé Hervé Tilmont, qui explique que « certaines compagnies exigent même un courrier des voyagistes s’engageant à rembourser les clients du trop-perçu, alors que chacun doit demeurer libre de sa politique commerciale ».

Le DG se félicite toutefois du dépoussiérage récent de la charte signée avec Air France il y a déjà plusieurs années, et de la signature d’une charte avec Transavia qui permettent d'améliorer les choses. « J’espère que mon successeur continuera à développer ces partenariats » a ajouté René-Marc Chikli.

Et ce d’autant que la direction transport de l’Union Européenne travaille actuellement à modifier les droits des passagers, avec un fort lobbying des compagnies aériennes et un potentiel recul à la clé. « Ce n’est encore un projet et les lignes peuvent encore bouger dans le sens des passagers » espère Hervé Tilmont.

Lire aussi : Europe : les ministres d'accord sur un rabotage des droits des passagers

Les décisions de l’Union Européenne seront également scrutées avec attention dans les prochains mois, dans le cadre de la révision de la directive sur les voyages à forfait, qui envisage d’introduire une limitation des acomptes quand aujourd’hui, chacun est libre d’appliquer ses propres règles.

« On pensait le sujet enterré mais le Parlement Européen l’a remis sur la table. C’est encore du conditionnel mais cette limitation des acomptes pourrait être réintroduite, avec la possibilité pour chaque état de fixer son propre pourcentage ».

« Quand on sait que la France a toujours tendance à surtransposer les directives, on peut s’inquiéter » ajoute Hervé Tilmont. La directive pourrait être définitivement votée en fin d’année, avec une transposition dans le droit français 18 à 24 mois plus tard.

Autre sujet important : le développement de Setosphère avec l’ambition de faire du concret en mobilisant des fonds pour « contribuer à des voyages neutres en carbone et jouer un rôle dans la protection de la planète ». Depuis sa création en 2023, la structure a mobilisé 1,6 million d’euros de dons et a permis d’économiser 220 000 tonnes de C02.

Le digital sera également au cœur des attentions, alors que l’Union européenne envisage de mieux contrôler l’usage des « dark pattern », ces éléments qui servent à inciter les clients à réserver et payer sur un site ; comme par exemple les mentions « il ne reste que deux places à ce prix ».

Si le SETO reconnaît certaines pratiques abusives, il considère qu’il serait dommageable de pénaliser l’ensemble des professionnels. Le sujet dépassant le seul tourisme, le syndicat va travailler de concert avec la Fédération du e-commerce et de la vente à distance (Fevad) sur ce point.

Enfin, Patrice Caradec souhaite continuer à faire grossir le SETO, qui regroupe à ce jour près de 80 membres dont Worldia, Aya Désirs du Monde, Açores Voyages ou Marco Vasco qui viennent d'adhérer au syndicat. Il souhaite notamment convaincre les spécialistes des clubs de vacances en France.